I'll wait for you until the streets become sand (CocoRosie au pouvoir) {Le pédophile et la boufeuse de sucreries!}

Ce qui est problématique lorsqu'on se blesse au genoux, habituellement, c'est qu'on nous colle un gros pansement qui tire sur la peau, les poils et qui fait très moche lorsqu'on met des collants.
Ce qui est problématique lorsqu'on se blesse au genoux, habituellement, c'est qu'on boite à moitié, qu'on ne peut pas sautiller dans les couloirs et descendre tranquillement les escaliers.
Mais ce qui est vraiment bien, c'est qu'à Lutwidge, on ne pouvait pas vraiment parler d'habitudes et encore moins de choses habituelles.
Juliette remercia donc intérieurement St Infirmière et sa regénération de cellules qui lui permis de se trimballer en short à bretelles (sur une adorable chemise d'écolière anglaise), les gambettes à l'air et à sautiller vers sa future victime d'emmerdement massif, se fichant bien des heures de colles qui l'attendait cette semaine et du fait que son rêveil n'est voulu la rêveiller qu'une demi-heure plus tard que l'heure prévue, remettant avec une désinvolture insolente son sac de cours sur son épaule, d'où pendait diverses breloques, rajustant son écouteur de son modeste Ipod et glissant joyeusement dans les couloirs.
Elle sautilla encore quelques instants et avec le visage de l'illuminé bienheureux, vit Sir Knopfer devant elle.
Et lui sauta au cou, quitte à lui repetter les cotes.
" ISRAAAAAAA!"

" Ha! Pas dès le matin, Démon de l'enfer! "
Nan mais c'était vrai. Il n'était pas un jouet en mousse. Et puis, qu'est-ce qu'elles avaient toutes à êtres folles de lui?
" Ha! en plus, tu es habillée comme une adorable pensionnaire! Mais va t'en! Je vais vomir des arc-en-ciel partout! "
Lui même ce jour là semblait, par un heureux hasard, avoir adopté une tenue assortie à celle de son enquiquineuse préférée. Il portait un jean sombre et une chemise négligemment ouverte, mais surtout, cadeau de sa soeur, une écharpe à carreaux très british. On aurait presque dit qu'ils en avaient fait exprès.
" Si tu continues, la brigade des moeurs va débarquer. Allez, décolle toi, petite créature envahissante "
Il se détourna, enfonça les mains dans ses poches, et, d'un pas désinvolte, se mit à longer le couloir. Théoriquement, ils auraient du être en cours depuis 15 minutes. Théoriquement.

Juliette eut une moue boudeuse, et rattrapant son pédophile préféré en quelques foulées guillerettes, s'accrocha à son bras telle la moule à son rocher.
" Et moi qui était venue toute contente et pleine d'amour te saluer! " fit-elle, mimant larmes et visage déchiré dans de pathétiques reniflements outrés ( une grande actrice, cette Juliette ) ...
... Avant de quelques millièmes de secondes plus tard, afficher un sourire bien craquant, qui aurait pu apparaître en image subliminale sur une pub de la maison des rêves des petits poneys magiques pour convaincre les fillettes d'ajouter ça à leur liste au père Noël, sautillant aux côtés de Monsieur Long-Nez.
" Au fait, je viens m'excuser pour tes côtes et ta fierté d'homme et je te remercie de les avoir sacrifiés pour mon humble personne. "
Haha. Et en plus, elle fait des rimes.
Elle fit basculer son sac sur sa hanche, ouvrit la poche avant, en sortit un sachet de caramel venant d'une quelconque île de Bretagne et l'agita sous le nez d'Israel.
" Alors? Vois donc ce que je tire de mes provisions rien que pour toi! "

Alors ça, c'était fourbe. Le prendre par son point faible, c'était lâche, très lâche. Il ne fallait pas s'attendre à autre chose de sa part, c'était certain, mais...
" Hmm " Fit-il, fine bouche, alors qu'intérieurement, c'était danse de la joie et rumba endiablée avec des caramels volants partout.
" Mouais. Ils sont périmés, je suis sûr. À moins que tu ne les aies faits venir tout exprès? "
Avec un faux air blasé, il tendit la main, et se saisit des friandises.
" Bon. Pour te faire plaisir, je vais en manger un, voire dix. mais c'est bien parce que c'est toi. "
Il ouvrit le petit sac plastifié, y inséra deux doigts, puis, lentement, tira un caramel qu'il considéra avec suspicion.
" Rassure moi. Tu n'as rien mis de louche dedans? "
On ne savait jamais, avec elle. Comme elle l'avait dit, sa fierté d'homme en avait pris un coup, ces temps ci. Depuis qu'il la connaissait, en fait. Extérieurement, il était toujours ce beau jeune homme brun qui faisait chavirer les filles. Intérieurement, il ruminait la honte des noeuds roses, des bonbons enfournés de force, et autres petites tortures signées Lipkin. Déjà, quand il résidait encore au foyer paternel, il n'avait jamais su dire non à ses soeurs. Allez, Hue Israel! Fais le cheval! Oui oui, Sarah. Allez, grand frère! On va courir dans la rivière! Oui oui, Rachel! Allez, Isra! On te coiffe aujourd'hui!
Oui, oui oui, et encore oui.
Il était faible face aux petites filles.

" Ce sont de sublimes caramels au beurre salé de Quiberon -voir de l'Ile de Ré, j'sais plus- sortit exprés de ma cachette à sucreries collantes pour toi! Je suis pas formidable? "
Il était évident que si.
Elle sautilla autour de lui, ravie, faisant clinqueter ses breloques accrochées à son sac de cours, ne pensant plus aux cours, d'ailleurs, qu'elle était sensée avoir depuis quelques minutes déjà.
" Alooooors? Merci quiii? Avec qui tu vas sécher les cours et dévaliser le congélateur des cuisines? A qui tu vas faire un calin?"
Regard de fillette afghane malaxé avec celui du chat dans Shrek (ce qui donnait un bel ensemble, soyez en sur).
~ L'auteur précise la popularité de son regard de chien battu voir de chat méfiant, c'est presque la même chose hein, face aux personnes de type arrivant-à-la-supporter et donne avec fierté ce don à sa chère petite Juliette, fruit de ses entrailles et des grincements des méandres de ce qui lui sert de cerveau (soit une barbapapa) Non c'est faut, je ne me débrouille pas pour faire mes lignes, vous êtes tous des menteurs. Et toc.~

Il fronça les sourcils.
" En tant qu'adulte, je me dois de te rappeler à l'ordre. Une enfant raisonnable devrait de dépêcher d'aller à son cours, blablabla. Bon, voilà pour la forme. Maintenant que tu as été prévenue par mes soins, je suppose que je suis dédouané de toute responsabilité vis à vis de tes incartades futures. Et si par hasard, elles allaient dans le même sens que les miennes, je ne pourrais pas t'en empêcher, après tout, on est dans un pays libre. "
Il croisa les bras, avec un beau sourire.
" Mais pour le câlin, va mourir. "
Il avait déjà une réputation de payday, mieux valait ne pas en remettre une couche.
Il commença à longer le couloir, en direction des cuisines.

" Alleeeez! Un calin par semaine et je te fournis des caramels ou d'autres trucs que t'aime à volonté! C'est pas une super offre, ça? "
Elle alla s'accrocher à son bras, tel le puceron à sa tige d'hortensia, avec le même air adorable que tout à l'heure, ronronnant comme un chat affamé en frontant sa joue à la chemise de ce très cher tonton Isra.
" S'il te plaaaaiiiit, j'suis en manque d'affectiioooon."
Reniflement de petit animal plaintif.
" Personne ne m'aaaiiime. "
Nouveau regard de shojo lolilol mangasse mignon tout pleins d'étoiles.
" Mais toi, tu m'aimes hein? "

" Achète toi un chat en peluche! " râla-t-il en secouant le bras. " Et ne bave pas sur ma chemise! J'taime pas, j'tai jamais aimée! " Ronchonna-t-il avec force machouillage de caramel et petites tapes sur le crâne de Juliette.
Voyant que la petite créature ne voulais pas le lâcher, il la saisit, la souleva de terre, et la balança sur son épaule, comme au bon vieux temps du pensionnat.
" Là! Arrête de t'agiter Rah! Me mord pas! "
Ils n'étaient pas vraiment discrets. Par les portes, des élèves, encore endormis, passaient la tête et les fixaient d'un air incrédule. Les retardataires auraient de quoi rire en classe, ce matin... Et alimenter la rumeur.
Une fille pointa un doigt vers eux, et ricana. Un petit ' pédophile ' fusa.

Juliette eu une sorte de petite exclamation sonore de surprise, avant de mordre comme prévu l'épaule du bel Israel.
" Zva mchmbourirr" fut à peu prés ce que la demoiselle reussie à articuler alors qu'elle mordillait sa chair.
Puis, incrédule, elle releva la tête, vit le doigt de la fille, entendit le pédophile et se dit que malheureusement, rire ne l'aiderait pas à avoir son calin.
Elle claqua donc des dents comme pour mordre le doigt pointé.
Puis railla, entre la blague et le sérieux du deuil.
" Moi j'suis une gérontophile, cruchasse, J'suis pas pédophile. "
Et toc.
On a pas cas embeter la peluche de Juliette Lipkin.
Même si la réplique n'avait rien de très fameux...

Israel cala sur place.
" Excuse moi Juliette, faut que j'aille expliquer la vie à cette... cette... cette... Créature. "
Il posa doucement la petite fille à terre, se redressa avec dignité et une trace humide à l'épaule, et, tignasse noire dans le vent, s'approcha de la malheureuse jeune fille de sa démarche féline.
" Bonjour mademoiselle " lança-t-il, onctueux comme un crème à la vanille.
Il fit son plus beau regard de braise. La fille était comme hypnotisée.
" J'ai cru entendre quelque chose de vilain dans votre bouche..? "
" Heu... Non, non " bafouilla la malheureuse, visiblement paniquée.
Israel lui décocha un sourire étincelant.
" Merveilleux. Dans ce cas...
Il rabattit la porte entrouverte au nez de la fâcheuse avec violence, et on entendit très nettement un ' Aie! ' étouffé quand elle se prit la porte en plein front.
" Tu vois Ju ' " rit-il en enfonçant les mains dans ses poches, CA, c'est ce qu'on appelle imposer sa loi '

" Mouais, t'as des atouts, quand même, et ça c'est vraiment de la triche."
Elle soupira, désolée, en secouant la tête comme une maman mécontente, alors que les autres spectateurs vaquaient à leur occupation en silence.
" Moi, je suis toujours obligée d'en finir dans une flaque de sang, ça en est lassant!..."
Et se raccrocha à son arbustre.
" Maintenant que tu as vaincu la cruchasse, j'exige mon calin. J'ai des caramels, pour toi, tu sais."

L'offre était tentante. Des caramels à volonté, ça, c'était un marché alléchant. Mais pense à ta fierté d'homme, Israel, pense-y bien.
" Désolé Miss, je ne suis pas un gigolo! "
Il avala encore deux autres caramels. À ce rythme là, le paquet serait très vite vide.
" Pauvre Juliette " railla-t-il avec un air ironique, en se passant la main dans les cheveux. Personne ne veut te comprendre, c'est pour ça que ta diplomatie est toujours aussi musclée. C'est bizarre que tu ne sois encore jamais passée en salle d'isolation... "
Israel y avait eu droit une fois et ça ne l'avait pas vraiment fait rire.
" Promets à tonton. Si la directrice tente de t'enfermer là dedans, on fait un coup d'état. "

" J'te promet tonton. "
Elle lui piqua d'un geste vif un des caramels, lachant un petit ricanement mélodieux.
" D'ailleurs je vais finir par y aller un jour assez rapidement si je ne me controle pas. "
Ce qui n'avait rien de très drôle, au fond, vu que derriere ses petits rires de jmenfousdlataulezyvajsuisunedelinquante, la chambre d'isolation n'avait rien de très charmant ni d'accueillant surtout qu'habituée à vivre dans la sécurité de son pouvoir, la frele mais insupportable gamine revoyait revenir avec honte et horreur les cauchemards d'enfant et d'adolescent qu'elle avait cessé d'avoir grace à sa particularité protectrice - c'qui n'était pas cool mais vraiment pas cool du tout. Elle haissait avoir peur.
Elle sautilla encore autour de son 'tonton', guillerette.
" t'es sensé avoir cours de quoi là?"

" Heu... Cours de littérature je crois. "
Un peu de publicité pour la filière L. Israel a rejoint la filière L. Les L, c'est le bien! Dieu a étendu sur les littéraires son ombre protectrice, il a béni leurs fronts purs et promis la félicité éternelle. En classe, nous rêvons, dessinons, nous avons le temps d'exister, 24 petites heures de bonheur par semaine. Faites comme Isra, soyez in, soyez fresh, roxez du poney, et rejoignez les L!
" C'est Beckett qui est au programme cette année. Enfin, en partie. Mais le théâtre absurde et moi... ( un temps ) c'est pas... ( un temps )... mon genre... ( un temps. Sourire. Il s'approche de la fenêtre, rire bref. S'en éloigne )
- l'auteur s'excuse pour cette avalanche de didascalies, tous les terminales L ici présents comprendrons ce à quoi elles faisaient référence -
" Et toi? Tu sèches quoi là? "
On ne pouvait pas vraiment dire qu'il ressentait le frisson coupable du type qui débauche une gamine. Il y avait eu un temps où lui même était particulièrement rigide, mais la vie au pensionnat lui avait donné une tournure nonchalante et presque débonnaire. Pour Rachel, ce changement d'attitude était bizarre ( elle l'avait vu avec une kippa, souvenez vous en ), mais il était probable que cela n'aie pas dérangé Juliette, dans la mesure où elle était grandement responsable de ce changement.
" Mais t'es en quelle classe déjà toi? "
C'était sa première terminale, et il s'imaginait difficilement la repasser encore et encore surtout quand ( un temps ) il considérait ses bons résultats. À part la géographie, qui l'ennuyait, ses notes étaient tout à fait honorables. Il était possible que l'option flûte à bec, prise sur la base d'un pari, ne soit pas des plus judicieuses, surtout quand on ne sait PAS jouer de cet instrument, mais il comptait bien se perfectionner au cours des semaines à venir. Et puis, grâce au piano, il connaissait son solfège, c'était déjà ça.

" Et bien, et bien..."
Bref effort de mémoire sur son emploie du temps de cette année, air vachement concentré, un doigt sur le menton, les sourcils froncés et le regard vide, au loin. Mais peut-être un peu trop vide et au loin pour que l'imitation soit d'une perfection parfaitement parfaite.
Elle balaya l'essaie de réflexion d'un geste désinvolte de la main.
" Histoire, sûrement, ou anglais. A moins que ce ne soit le jeudi. Bref. Un truc du style. "
Et reprit sa mine de pure enfant sautillante.
" Et j'suis eeeeen troisieme, pour la deuxieme fois! Alors, pas besoin d'aller en cours, quoi. J'n'aime pas les répétitions [Hey, Ill', tu crois pas qu'elle s'entendrait pas avec Mia, cette petite?]" professa t-elle (même si ce verbe n'est pas très adapté à son expression du visage) enfin, remontant la bretelle de son EastPak sur son épaule.

" Mouais. On ferait mieux de travailler seuls à la bibliothèque "
Israel, le sérieux scolaire fait homme. Bon, pas exactement, puisqu'il sèche les cours, mais on va dire que dans le fond, il a un profil d'intello de la classe.
" On pourrait travailler un peu l'histoire, ces matières là. Le saint empire romain germanique, tout ça. "
Cela pourra sembler étrange, mais Israel était très attaché à sa patrie. Il était fier d'être allemand, fier de l'allemagne et de ses habitants, de sa politique, son économie, ses arts. Plus que tout, il aimait la droiture et la rigueur teutones. Il se sentait bien plus allemand que juif, malgré son côté très cosmopolite.
" Je m'ennuie " lança-t-il soudain, comme s'il espérait que la fée juliette allait le délivrer de ce sentiment désagréable d'un coup de baguette magique.
Soudain, un excellente idée lui vint à l'esprit.
" Et si on allait jouer un vilain tour à la directrice? "
Il avait légèrement baissé la voix. Des mois que cette femme faisait régner sa loi de fer, des mois qu'ils étaient prisonniers ici, et quoi? S'échapper? Impossible, pour le moment en tout cas. Mais semer un joyeux bordel, ça, c'était dans leur cordes. Israel caressait depuis quelques temps le rêve d'enclencher une vague d'actions délictueuses ( je pense toujours à Arty quand j'utilise ce mot. Délictueux.. ) Mais pas tout de suite. Trop tôt. Quand l'exaspération serait bien montée, il serait temps de montrer à cette satanée directrice de quoi quelques gamins un peu trop agités était capables. En attendant, un petit préavis serait sans doutes des plus amusants.
" Avec une petite préparation et un itinéraire tracé d'avance, on peut sans doutes lui laisser un... Cuisant souvenir "
Il claqua des doigts d'un air satisfait.

Le mignon minoie (essayez de dire ça, à voix haute, "mignon minoie", vite et plusieurs fois. C'est comme "ami emo". Ca peut occuper une vie.) de Mlle Juliette se transforma en un sourire carnassier, les yeux pétillants d'envie et d'exitation - enfin, ça allait bouger!-, les pomettes de son visage d'enfant devenant rouges de plaisir et quelques dents se dévoilant enfin dans son sourire de vampirette - ou de chieuse, au choix- alors qu'elle conservait son sautillement régulier.
Là, elle reconnaissait bien son cher Israel.
" Hm, ce n'est pas une mauvaise idée " débuta t-elle avec la pensée qu'effectivement, c'en était une merveilleuse " Pour ce là, mon caporal, il vaut mieux connaitre quelques vices de notre amie la Directrice, et même des peurs, ce serait merveilleux. Mais je ne pense pas que grand monde soit informé là dessus. Donc, improvisons. Une idée, peut-être?.."

Ses phobies? Il n'ne avait aucune idée. Mais il y avait des choses qui marchaient à chaque fois.
Il se caressa pensivement le menton.
" Ayant moi même tout testé sur Père, je peux distinguer deux méthodes. La méthode longue, très efficace , mais qui réclame beaucoup de patience. Et la méthode ' coup de poing '. Elle met généralement la victime dans un état de fureur avancée, mais est moins efficiente à long terme. "
La technique longue consistait en toute une série de petits déplacements, fausses affirmations, qui finissaient par rendre la cible complètement perdue, voire même la persuader de folie. La méthode éclair se résumait elle pas un saccage en règle du bureau directorial, et, pourquoi pas, soyons fous, par un pillage des dossiers confidentiels liés au système qui régissait l'établissement.
Israel, fourbe comme toujours, préférait les petites tortures psychologiques, mais elles semblaient compliquées et dangereuses à appliquer. Bon, peut être que pour une fois, la technique marteau burin suffirait.
" Le souci c'est que les professeurs auront noté notre absence. Si jamais on fait ça maintenant, il ne sera pas bien difficile de deviner les coupables. Mieux vaut attendre la pause midi... Ou alors...

Un grand sourire mauvais éclair son visage.
" Dis moi, tu as vu Amélie Poulain...? "

"Amélie Poulain?"
Vous pouvez à peine imaginer l'effort de mémoire dont juliette du faire preuve pour retrouver dans sa mémoire abyssale les images à placer sur ce nom là.
Elle fronça les sourcils d'une façon bien particuliere, comme si elle était agacée par un quelconque moustique, marmonna un petit "hmmmm" en répétant par moment le titre du film dont il était question et finit par trouver, entre un souvenir d'anniversaire et celui de brulures de méduses, celui d'une soirée-télé banale.
" Ah! Amélie Poulain! Oui, ça me revient!" (car il fallait bien en informer le belâtre allemand)
Pour accetuer cette découverte, elle tapa son poing dans la paume de sa main.
" Ouii, je l'avais bien aimer il me semble. Mais je n'en ai que de très vagues souvenirs."
Un temps.
Elle releva sur lui un regard qui signifiait qu'il désirait une réponse à son questionnement actuel.
" Mais pourquoi tu me demandes ça?"

Israel avait une idée. Israel a toujours des idées. Et peut être que cette idée allait lui plaire.

Le bel Israel ricana.
" Hé bien. Si tu te souviens de ce passage... À un certain moment, l'héroïne investit l'appartement d'un homme qu'elle veut punir. Elle modifie tout discrètement : elle démonte puis remonte les poignées de portes dans le mauvais sens, trafique les ampoules, le tube de dentifrice, tout. Puis repart. En apparence, l'appartement est dans le même état qu'elle l'a trouvé... En apparence seulement... "
Israel avait bien aimé ce film. Même si Amélie était absolument malsaine.
" Quand le malheureux rentre chez lui... "
Subtil et incroyablement désagréable.
" Il faudrait qu'on fasse ça en pleine nuit! À moins que tu ne connaisses l'emploi du temps de la directrice...? "
Rachel le connaissait sans doutes. Rachel savait tout ce qu'il fallait savoir pour semer la désolation sur son passage.
" D'abord on repère les lieux, pour emmener le matériel. On va aussi rafler des documents au passage. ça peut toujours nous servir plus tard "
Il parlait vraiment bas à présent. Pas question d'un élève malveillant n'aille les dénoncer, ou tout était cuit.
" Et en échange de cette brillante idée, aurai-je droit à mes caramels quand même? "

Effectivement, Israel avait une idée et toujours aussi effectivement, cette idée lui plaisait fort bien.
Un sourire incroyablement malsain s'étirant sur le coin des lèvres, Juliette fit basculer son sac de cours devant elle, levant un peu le genou pour le faire tenir en équilibre dessus, l'ouvrit et en sortit au bout d'une longue fouille un autre sachet de caramels divers qu'elle lui tendit.
" C'est bien parce que c'est toi et parce que tu m'as donné envie de revoir ce film, hein... "
Elle referma son sac et le remit sur son épaule.
" Opérer la nuit serait préférable, même quand la Directrice est absente, des assistants, secrétaires ou professeurs ne cessent jamais d'aller et venir dans les locaux. On se débrouille pour trouver le matériel et on se retrouve une nuit pour faire cela. Par contre il faudra jouer aux experts, cette vieille folle irait même jusqu'à chercher des empreintes digitales pour savoir qui a fait le coup, et si on est découvert, on risque très clairement un joli séjour en chambre. "

Israel recommença à mâcher des caramels.
" Chest bon pour moi, elle retrouvera jamais mes empreintes "
Longue histoire. Après une expérience malheureuse en cours de physique, Israel s'était renversé sur les mains une solution très diluée d'un acide dont il avait oublié le nom. Il n'en gardait que des très fines traces sur la paume et le dos des mains, mais la pulpe de ses doigts était comme polie, et ses empreintes, - même si elles se reconstituaient au fur et à mesure que la peau cicatrisait - étaient encore à moitié effacées. L'accident était tout récent, mais Israel en gardait un douloureux souvenir.
De toute façon, dans une pension close, des empreintes presque complètement effacées constituaient une signature encore plus évidente qu'une belle marque de pouce sur une table en verre.
" On devrait faire ça dans deux ou trois jours. Et se tenir à carreau dans l'intervalle. Vers 3 heures du matin serait un bon horaire, je pense... "
Il se mordit la lèvre. Il venait de se rappeler un détail déplaisant.
" Ceci dit... J'ai dans ma chambre une pensionnaire in-su-ppor-ta-ble qui s'appelle Léas. On s'aime pas trop lui et moi. Si jamais il se réveille et découvre mon absence, tu peux être sûr qu'il ira tout raconter gentiment à la directrice "

Juliette haussa les épaules comme pour écarter de sa vie de nuisance sympathique ce détail embetant.
" Tu le drogues. Je te fournirais un petit mélange somnifére-vodka que nous avons mis au point moi et mes connaissances sexistes et anti-pouffes, ça marche vraiment bien. Tu glisses ça dans son tube de dentifrice, discretement au fond d'un verre d'eau, tasse de thé, café, et autre, enduis une friandise ou un quelconque médicament qu'il doit prendre dans ce liquide et il ronflera jusqu'à que rêveil tardif s'en suive. " chantonna la guillerette adolescente en piquant aussi un caramel du paquet qu'elle venait de donner à Israel.
" Et chi cha marche pas tu lachomes. Enfin t'es achez fort pour te debrouiller, hein... "
Elle glissa son doigt dans sa bouche pour décoincée le caramel collait à une de ses dents.
" Pis on aura cas prier ta soeur de nous aider pour les détails matériels ou techniques.

Il fit craquer son cou.
" Rachel n'acceptera jamais de nous aider gratuitement. Pas si TU es dans le coup. Il va te falloir beaucoup, beaucoup de chocolats... Quant à Léas, je l'assommerais volontiers. Mais j'aurais peur de lui casser quelque chose. C'est une brindille ce type. Dans le genre travelo. Pour le faire boire il faudrait verser ta vodka dans une bouteille de Veuve Clicot. "
Entre lui et Léas c'était la guerre. Et il n'était pas question de se faire de cadeaux.
" Je propose que nous allions piller cette cantine. Ensuite on se sépare et on se retrouve demain pour mettre ça au point. "
Il pointa vers Juliette un index décidé.
" Et que ça ne s'ébruite pas hein? Je connais ta réputation de bavarde! "
Sans qu'il s'en soit aperçu, ils étaient arrivés en haut de l'escalier qui menait au hall. Le self devait être à 5 ou 6 minutes de marche. Les caramels lui avaient ouvert l'appétit. Il était tant d'aller semer désordre et chaos dans les précieuses réserves de nourriture de la pension Lutwidge.
" Soldat! En avaaant... marche! "

" Roger! "
Juliette fit claquer les talons de ses chaussures contre le sol, gonflant le torse et placant sa main à sa tempe.
Elle perdit sa pose pour s'accrocher telle la molassonne gluante et calineuse qu'elle était au bras de Sir Knopfer, passant comme elle aimait tant le faire du coq à l'ane.
" J't'aime bien Isra. " chantonna t-elle, s'laisant aller à une p'tite déclaration en l'air mais tellement vrai, laissant tomber sa tête contre le bras du jeune homme.
" Si t'avais pas déjà tout pleins d'soeurs, je demanderais à tes parents d'm'adopter pour l'être, moi aussi. Enfin."
Elle fronça les sourcils.
" Ta soeur aura son chocolat. et je serais muette comme une carpe, don't worry "